HISTOIRE DES LACS DE LA FORET D'ORIENT

HISTORIQUE DU PROJET

A la fin du XIX siècle, la révolution industrielle a contribué au fort développement de Paris. La population grandissante a rendu stratégique un approvisionnement en eau constant sur l’année et de plus en plus important en volume.
La Seine semblait être déjà à l’époque une solution pour y parvenir.
Les grandes inondations du début XX (1905-1910 -1924) contribuèrent à forger la nécessité d’un projet pour réguler le fleuve.

1925 consacre l’esquisse de projets visant à barrer l’Yonne à Pannecières (Nièvre) et de contrôler les 3 fleuves de la région (Seine-Aube-Marne) par « des lacs réservoirs ».

Les Aubois témoignèrent d’une hostilité marquée pour ces projets à compter de 1930 .Les représentants politiques locaux de l’époque organisèrent les contre-pouvoirs qui finirent par prendre la forme d’un comité de défense à partir de 1956. « Les aubois ne voulaient pas céder leurs terrains ».

Un ingénieur parisien, Henry Chabal, portait le projet à son départ, et avait vu des 1918 l’intérêt géologique du secteur (Géraudot –Mesnil St Père-Lusigny) déjà riche en étangs.
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La présence d’un sous-sol chargé d’argile homogène, épaisse et dense sur ce secteur offrait tous les avantages pour poser les fondements des réalisations actuelles : des lacs réservoirs en dérivation des fleuves par l’intermédiaire de canaux, permettant ainsi une régulation des débits. 

S’agissant de la Seine, le projet était rendu complexe à différents niveaux. Les équations techniques à résoudre étaient nombreuses, complexes et donc potentiellement coûteuses. 
  • Déterminer une capacité à la fois suffisante pour endiguer les crues (hivernales et printanières) et permettre un débit satisfaisant du fleuve en été.
  • Des barrages (digues) ne devant pas être submergés.
  • Des barrages qui maintiennent de l’eau en quantité suffisantes pour envisager une production hydro-électrique.
Les inconvénients intrinsèques au projet donnaient pas ailleurs des arguments à ses opposants :
  • Les conséquences dramatiques en cas de rupture des digues.
  • La disparition de 3 tuileries.
  • la disparition de 3 fermes.
  • La disparition de la forêt de Larivour.
  • Le transfert de 180 tombes du cimetière de Mesnil Saint Père.
La crue Parisienne de 1955 provoqua une accélération du projet du lac d’Orient. Un avis négatif fut donné par l’enquête d’utilité publique de 1956 et mettait en avant une volonté parisienne d’imposer le lac sans grande concertation.

Le projet finit par recueillir l’adhésion auboise en 1956 après une phase de réunions soutenues, des engagements de dédommagements et la prise de conscience d’une protection contre les inondations de Troyes, induite par la création du lac.

Encore aujourd’hui perdure néanmoins encore l’idée que seul les parisiens tirent un bénéfice de protection, alors que s’est bien l’ensemble du territoire aval des lacs (dont Troyes) qui en est le bénéficiaire.

Le lac d'Orient

Début des travaux : le 16 novembre 1959
Ce chantier titanesque employa près de 300 personnes dont une forte communauté portugaise et maghrébine (compte tenu d’une main d’œuvre locale déjà réduite pour les besoins locaux).
Coût total : 147 millions de francs.

L’expérience du lac d’Orient permit de préparer techniquement et politiquement les autres projets de lacs réservoirs, dont le lac du Der (travaux en 1967- 1974) qui fut de loin l’infrastructure nécessitant de forts bouleversement des territoires (3 villages noyés). Le lac du Der reste le plus grand lac artificiel Français (48 kms 2).
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Le réservoir Aube

Le projet, envisagé à compter de 1956 fut mis en stand-by du fait de la mobilisation locale contre le lac d’Orient. 
Près de 20 ans plus tard, en 1975, avec le retour d’expérience de la construction et mise en eau d’Orient et du Der, le projet du lac réservoir Aube fut remis à l’ordre du jour. 
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Plusieurs paramètres permirent d’envisager une construction dans un climat plus serein (et ceux en dépit d’une mobilisation sociale forte). 
  • Le projet, dans son emprise foncière ne nécessitait que 2 expropriations significatives, rendant plus simple l’opération
  • L’IRRBBS (ex EPTB Seine grand lacs), fort des expériences des 2 autres lacs adopta une attitude marquée de concertation. L’organisme mit en place des compensations financières facilitantes.
  • L’ère du temps était également à une plus forte implication dans les impacts économiques et environnementaux de tels projets. A la lumière de la création des 1968 du PNRO (Parc Naturel Régional de la Foret d’Orient), les tracés du projet, prirent en compte des éléments liés à la faune et la flore.
  • L’impact touristique et donc économique d’un tel projet pouvait globalement laisser envisager des retombées positives et une valorisation du territoire (surtout en pleine mutation économique du département à cette époque).
  • Le projet de centrale nucléaire à Nogent sur Seine ajoutait une contrainte supplémentaire de compensation et de lissage du débit de la Seine (afin d’approvisionner les systèmes de refroidissement, principalement entre juin et octobre).
Les travaux du lac réservoir Aube (Temple + Amance) 
Durée des travaux : 1983-1990 
Ce projet est atypique dans sa configuration de créer 2 lacs reliés par un canal de jonction. 

Principales étapes : 
  • La prise d’eau à Beaulieu
  • Le barrage de Radonvilliers
  • Le barrage de Brévonnes
  • Le canal de restitution (arrivée à Mathaux)
  • L’aménagement de port Dienville (1992).
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épilogue

L’inauguration le 26 juin 1990 du lac réservoir Aube par Jacques Toubon refermait ce dossier né dans les années 1920. 
Les 4(5) lacs réservoirs achevés (Orient-Temple-Amance-Der-Pannecières) assuraient désormais pleinement la régulation de la Seine, de l’Aube, de la Marne et de l’Yonne.

Certes, il est indéniable que les projets dans le département de l’Aube ont transformé l’environnement de façon significative. 
- Des forêts furent détruites, des personnes et infrastructures déplacées. 
-Les régimes hydrauliques des rivières ont été modifiés. 
Le lissage des crues, en particulier au printemps ne permettent plus toujours de réunir les paramètres indispensables à la reproduction du brochet et d’autres espèces en aval des lacs. 
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  • Mais qui remettrait à ce jour leur bien-fondé et la qualité écologique des espaces créés ?
  • Qui pourrait douter de leur impact dans la vie économique et sociale locale ?
  • Qui ne les considère pas comme des espaces de valorisation et d’attrait touristique pour le territoire?
Peu de monde à en croire la fréquentation des lacs Aubois, l’engouement pour les activités de loisirs qui s’y sont développées au fil des années et leur présence sur tous les supports de valorisation touristique.

Oui mais
Les récentes crues de 2016 posent non pas tant la question de l’efficacité des 2 lacs réservoirs qui ont su jouer pleinement leur rôle dans la gestion des crues, que de nouvelles interrogations soulevées par les changements climatiques auxquels sera confronté le bassin de la Seine dans les années à venir.

Et les pêcheurs dans tout cela... ?

Leur implication a conduit au fil des années à faire des 3 lacs de la forêt d’Orient un des plus beaux spots de pêche en France. Les pêcheurs sont des acteurs pleinement intégrés dans les écosystèmes environnementaux et touristiques.

Pour les lacs, ils sont issus du département. Ils viennent également de 80 départements français et de 15 pays européens, voir d’autres continents. Certains n’hésitent pas parfois à faire plus de 500 kms pour faire une session de pêche sur nos lacs.

N’est-ce pas la confirmation de la qualité halieutique et de l’intérêt des lieux ?
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L’AAPPMA DES LACS DE LA FORET D’ORIENT milite pour une pratique de pêche respectueuse des milieux et de la biodiversité des lacs. Ses investissements financiers pour maintenir et développer une bio masse halieutique témoignent de son implication dans la gestion des environnements lacustres. Ses projets sur le suivi et la protection des populations piscicoles en font un partenaire actif et incontournable des acteurs impliqués.